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«Nous sommes l’Univers qui se pense lui-même et qui médite sur ses origines»

Vue d'artiste d'un trou noir entouré de matière noire. | G. Bertone / Springer et al.

Dans un ouvrage tout juste traduit en français, l’astrophysicien Gianfranco Bertone revient sur quelques-uns des plus grands mystères de l’Univers. Un exercice de vulgarisation mené en virtuose et qui convoque, en lieu et place d'équations abstraites, des métaphores inspirées par des grands noms de la littérature. Heidi.news a échangé avec lui.

Gianfranco Bertone est astrophysicien, professeur en astrophysique à l’Université d'Amsterdam et directeur du Consortium européen pour la physique des astroparticules. Dans Entre deux infinis, les ondes gravitationnelles et l'origine quantique des plus grands mystères de l'Univers, publié en français aux éditions Quanto, il explore quelques grandes énigmes qui traversent l’astrophysique et la cosmologie.

Que s’est-il passé juste après le Big Bang? Pourquoi l’expansion de l’Univers accélère-t-elle? Quelle est la nature de la matière noire? Comment trancher et dépasser les spéculations théoriques? Entretien.

Heidi.news – Dans votre livre, vous revenez sur l’essor de l’astronomie «multi-messager», qui s’appuie sur d’autres signaux que la lumière. De quoi s’agit-il, et en quoi est-ce un enjeu?

Gianfranco Bertone Il faut d’abord revenir sur l’astronomie classique. On pourrait décrire les découvertes de l’astronomie au 20e siècle comme un voyage à la découverte des couleurs de l’Univers qui sont invisibles aux yeux humains. Ce voyage a permis de sonder les ondes électromagnétiques à des énergies inférieures ou supérieures à ce que perçoit l’œil humain: infrarouge, radio, rayons X, rayons gamma… Mais il y a toutes sortes de messages du cosmos qui ne sont pas transmis par la lumière: c’est notamment le cas des neutrinos, des rayons cosmiques ou des ondes gravitationnelles. Ce sont d’autres messagers, de nouvelles fenêtres sur l’Univers qui nous permettent de capter des événements indétectables autrement.

Prenons les ondes gravitationnelles (détectées pour la première fois en 2015, et prédites un siècle plus tôt par Einstein, ndlr.). On peut les comparer à des tremblements de terre: on ne peut les «voir» à distance, mais les géologues peuvent reconstruire avec précision les paramètres d’un séisme en mesurant les vibrations du sol. Pour les ondes gravitationnelles, c’est la même chose, mais avec des vibrations de l’espace-temps. Elles sont par exemple émises lors de la fusion de deux trous noirs, un événement qu’on ne pourrait jamais observer seulement avec des télescopes.

Quel serait un exemple récent de succès de l’astronomie multi-messager?

Prenez les neutrinos (particules produites au cœur des étoiles qui n'interagissent que peu avec la matière, ndlr.). Jusqu’à présent, on avait surtout pu détecter des neutrinos produits par le Soleil, mais on sait qu’il existe des neutrinos dits «astrophysiques» produits ailleurs. On n’en avait détecté qu’une seule fois en 1987. Grâce à l’expérience IceCube menée au pôle Sud, avec des capteurs disposés sur un volume d’un kilomètre cube, on a pu en détecter bien d’autres.

Vous évoquez une «fissure» dans les modèles théoriques, qui menace la cathédrale de la cosmologie moderne. Et vous écrivez que le point commun des quatre plus grands mystères de l’Univers est d’emprunter autant à l’infiniment grand qu’à l’infiniment petit…

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