L'Europe veut construire de nouveaux satellites pour observer les sources de CO2 sur Terre

Le sommet de l'ESA dédié à l'observation de la Terre se tient du 13 au 17 mai 2019 à Milan | S.S.

L’Agence spatiale européenne (ESA) pourrait mettre en orbite, d’ici 2026, six nouveaux satellites pour déterminer les sources de dioxyde de carbone. C’est ce qu’a annoncé l’ESA à l’occasion de son Living planet symposium, qui se tient du 13 au 17 mai 2019 à Milan, auquel assiste Heidi.news.

Pourquoi c’est important. Il existe déjà des satellites chinois et japonais capable de mesurer la concentration en CO2. Mais ils ne peuvent pas le faire en continu, et pas de façon suffisamment précise pour distinguer les émissions d’origine naturelle des sources anthropiques (générées par l’homme).

Josef Aschbacher, directeur des programmes d’observation de la Terre à l’ESA, souligne que la décision finale sera prise en novembre par les États membres de l’ESA. La Commission européenne souhaite un lancement à l’horizon 2026.

«Le dioxyde de carbone est un gaz difficile à mesurer depuis l’espace. Des satellites chinois et japonais en réalisent déjà des estimations, mais leur résolution n’est pas suffisante pour comprendre d’où il vient.»

Pourquoi cette attribution est difficile. Un satellite observe le CO2 dans ce qu’on appelle une «colonne», l’air qui se trouve le long de la direction pointée par les instruments vers le sol. Pour identifier l’origine de ce CO2, il faut recouper les observations spatiales avec des mesures au sol. Alain Ratier, directeur général de l’Organisation européenne pour l’exploitation des satellites météorologiques (EUMETSAT):

«Pour savoir ce qui se passe dans cette colonne, il faut combiner différents modèles. C’est un vrai défi scientifique.»

Pourquoi mesurer le CO2 d’origine humaine? On peut déjà estimer, pays par pays, les émissions de gaz à effet de serre. Mais ces données sont entachées d’incertitudes, qui peuvent être réduites avec des observations par satellite.

Rattacher les causes et les effets du changement climatique est devenu un enjeu de communication majeur, rappelle le directeur d’EUMETSAT:

«Ce n’est qu’en reliant les événements climatiques extrêmes au changement climatique qu’on pourra faire comprendre au public le lien très clair entre les deux.»

Comment le satellite fonctionnera-t-il. Le projet, qui devrait être rattaché au programme Sentinel, est encore une ébauche. On ne connaît donc pas précisément la technologie de mesure qui sera utilisée pour ses instruments. Mais il devrait s’agir de spectromètres, nous explique Maurice Borgeaud, directeur du département de la science et des applications de l'observation de la Terre de l’ESA.

Pour Martin Visbeck, directeur de recherche au Hemholtz Center for Ocean Research de Kiel (Allemagne), la dimension européenne de ce futur satellite est essentielle.

«On a pu voir que le monde était capable d’une coopération spatiale internationale. Maintenant, le défi, c’est de résoudre la crise climatique ensemble. L’Europe se doit d’être un modèle et d’ouvrir la voie.»