Xi Jinping défend l’action de la Chine et promet deux milliards contre le coronavirus

Le président Chinois Xi Jinping a défendu la gestion de la crise par son pays lors de la 73e Assemblée mondiale de la santé, qui constitue l’organe de direction de l’OMS et se tient en ce moment à Genève et dans le monde.

Le président chinois Xi Jinping a annoncé que son pays financerait l’initiative de l’OMS contre Covid-19 à hauteur de deux milliards de dollars, lors de son discours introductif à l’Assemblée mondiale de la santé, lundi 18 mai. Une somme que les Etats-Unis, mécontents de l’organisation et désireux de limiter leurs contributions financières, auront du mal à atteindre. Et ce, en dépit de leur volonté affichée de s’aligner sur l’Empire du milieu, à la suite d’une fuite opportune quelques jours avant l’événement.

Pourquoi l’OMS a besoin de fonds. La promesse de la Chine ne vient pas seule. Plusieurs Etats-membres de l’OMS, dont l’Allemagne, se sont engagés à abonder au fonds spécial Covid-19 et aux finances de l’organisation après que le Etats-Unis ont annoncé leur intention de geler leurs contributions annuelles, de l’ordre de 430 millions par an. Le budget de l’OMS est calculé sur une base biennale. Pour 2020 et 2021, l’organisation dispose 4,8 milliards de dollars pour mener à bien ses programmes, soit 2,4 milliards par an.

La Chine se défend. Le président chinois a annoncé que cette initiative incluait la mise en place de corridors de transport («green corridors») destinés à livrer rapidement des biens vitaux à destination de l’Afrique, un partenariat avec 30 grands hôpitaux du continent, une suspension de la dette des pays africains et l’intensification des efforts en vue de développer un vaccin contre Covid-19.

Xi Jinping a également défendu la réaction de son pays face à l’épidémie, affirmant que la Chine a agi de façon ouverte et responsable en partageant ses informations avec la communauté internationale. Il en irait de même concernant un futur vaccin chinois, a-t-il poursuivi, si les programmes de recherche aboutissent.

«Quand il sera disponible, le vaccin sera un bien public. Ce sera la contribution de la Chine à la question de l’accès aux vaccins», a déclaré l’homme fort du pays, dans son allocution vidéo en ouverture de la première Assemblée mondiale de la santé virtuelle. Le président français Emmanuel Macron, qui s’est exprimé juste après son homologue chinois, a également assuré de son engagement en faveur de l’accès à un futur vaccin.

De façon notable, la Chine était le premier Etat-membre «de haut rang» à s’exprimer en ouverture de l’Assemblée mondiale de la santé, juste après la traditionnelle allocution de bienvenue de la Suisse.

La Chine a jusqu’à présent refusé la mise en place d’une enquête sur les conditions d’émergence du nouveau coronavirus, autour d’un marché alimentaire de Wuhan. Mais Xi Jinping a déclaré que Beijing était ouvert à l’idée d’une évaluation impartiale sur cette question et d’autres, une fois que la pandémie sera sous contrôle. Ajoutant:

«Cette mission nécessite une attitude scientifique et professionnelle, et doit être conduite par l’OMS. Les principes d’objectivité et d’impartialité doivent être assurés.»

La réaction américaine. Le secrétaire d’Etat américain à la Santé, Alex Azar, n’a quant à lui pas pris de pincettes pour critiquer tout à la fois l’OMS et la Chine, sans toutefois mentionner explicitement cette dernière. Alex Azar:

«Au moins un Etat-membre a tourné en dérision ses obligations de transparences, au détriment du monde entier. Nous avons vu que l’OMS avait échoué à mener à bien une de ses missions essentielles, qui consiste à partager l’information et assurer la transparence quand les Etats-membres font preuve de mauvaise foi.

L’une des raisons fondamentales pour lesquelles cette flambée épidémique est devenue hors de contrôle réside dans l’échec de cette organisation à obtenir des informations dont le monde avait besoin, et cet échec a coûté de nombreuses vies. Le statu quo n’est pas tolérable. L’OMS doit changer, devenir bien plus transparente et responsable de ses actions.»

À propos des deux milliards de dollars promis par la Chine:

«Nous sommes fiers d’allouer plus de 9 milliards de dollars au fond de lutte contre Covid-19, dont plus de 500 millions de dollars au bénéfice des pays les plus à risque.»

Les Etats-Unis ont aussi appelé les Etats-membres de l’OMS à autoriser Taïwan à participer à l’Assemblée en tant qu’observateur, assurant que Taipei «apporterait une perspective utile au regard de leur réponse efficace et exemplaire à la crise». En amont des déclarations d’Alex Azar, la question de la participation de Taïwan à la 73e Assemblée mondiale de la santé avait été repoussée à la session technique, qui devrait avoir lieu plus tard dans l’année.

La résolution Covid-19. Avant la fin de la séance de lundi, les Etats-membres de l’OMS se sont attelés à l’approbation de la résolution en faveur d’une réponse à Cvid-19, menée par les pays européens et soutenue par plus d’une centaine de pays: l’Europe dans son ensemble, à l’exception de la Suisse, le bloc des pays africains, et les pays les plus importants d’Amérique latine et d’Asie, tels que le Chili, le Mexique, le Brésil, l’Inde, le Bangladesh et l’Indonésie.

La résolution d’initiative européenne appelle à la création d’un «pool» de licences pour les futurs traitements et vaccins contre Covid-19, et affirme soutenir une OMS forte et «financée durablement» face aux enjeux de la pandémie. Elle recommande néanmoins une «enquête point par point» de la gestion de la crise par l’organisation, «en temps utile». C’est là un geste à destination des États-Unis et des autres pays pour qui la Chine a mis trop de temps à partager ses informations en début d’épidémie et n’a pas conduit d’enquête sur les origines de la maladie – certaines sources allant jusqu’à se demander si le virus n’a pas émergé par accident au sein d’un laboratoire de recherche.

Dans ses remarques introductives à l’Assemblée, le directeur général de l’OMS Tedros Ghebreyesus a annoncé qu’il lancerait une telle évaluation «dès que possible». Avant d’ajouter que la leçon principale de la pandémie était déjà connue:

«Nous n’avons pas besoin d’une enquête pour savoir que nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir en vue d’assurer que tout ceci ne se produira plus.»



Cet article, initialement diffusé sur la plateforme Geneva Solutions, est signé Elaine Ruth Fletcher et a été traduit de l’anglais par Yvan Pandelé. Une version plus complète est disponible (en anglais) sur le site Health Policy Watch, dédié aux problématiques de santé globale.