«C’est trop compliqué» m’a-t-on expliqué tout d’abord. «On ne voit pas comment mettre en place ce concept» ou «on verra après la crise»… Autant de propos entendus en commission parlementaire et aussi à l’OFSP. Bien sûr, l’exemple souvent repris par les médias des fameux fax utilisés pour transmettre les données au début de la pandémie avait jeté quelques soupçons sur notre capacité à transmettre et utiliser des données en période de crise.
Mais de là à revoir toute la procédure afin de cibler les bonnes informations auprès des professionnels de santé, de les comparer et de les relier entre elles pour éviter des mesures désastreuses comme la fermeture, même momentanée, des écoles ou le confinement strict des personnes âgées dans les homes, il y avait un grand pas que même le chef de Département de l’intérieur, Alain Berset, ne voulait pas franchir, du moins dans la précipitation. S’appuyant sur de nombreuses études et analyses en cours, le Conseil fédéral ne semblait pas comprendre qu’il n’y a pas de vision stratégique dans le traitement des données de santé et qu’il manque une vraie culture nationale de communication à tous les niveaux. C’est un peu comme si vous rassemblez des galets de différentes plages pour bâtir votre château… sur du sable.
Qu’est-ce qui a fait basculer, tout d’abord de manière serrée, la commission de la santé, puis massivement le Conseil national? C’est ce fameux dossier électronique du patient. Son enlisement a suscité en commission de longs débats sur l’urgence de la numérisation des données. Puis est apparue cette évidence: il ne sert à rien de récolter sur des ordinateurs une quantité énorme de données s’il n’y a pas un concept clair et précis de gestion et d’interprétation de ces données. D’ailleurs, n’importe quel médecin vous dira que la question essentielle est de savoir ce qu’on doit mettre dans le dossier électronique pour assurer une meilleure qualité des soins.
C’est ainsi que fort des nombreuses explications et recommandations des praticiens, les parlementaires de quasiment tous les partis se sont laissé convaincre. Evidemment des pistes d’actions ont été évoquées:
concertation entre l’OFSP, l’Office fédéral de la statistique, l’Académie des sciences et les experts en littératie des données pour établir un codex et des directives compatibles avec les développements internationaux les plus récents;
utilisation de pools de données existant élargis au domaine ambulatoire,
poursuite de programmes flexibles et adaptés aux situations d’épidémies futures (comme Sentinella Plus).
Pas encore convaincu ou pas assez concret? Alors jetez un coup d’œil sur la récente campagne «Data literacy» de prévention contre les maladies infectieuses transmissibles intitulée «Unis pour la santé – gardons les bons réflexes!» Elle vous permettra de ne pas perdre les bonnes habitudes d’hygiène apprises durant deux ans de pandémie, à savoir des gestes simples appliqués au bon moment et au bon endroit.