La franchise élevée, c'est une franchise solidaire. En 1996, les personnes qui avaient la franchise la plus basse recevaient globalement 1000 francs nets de prestations, contre 1000 francs de charges nettes pour ceux qui avaient opté pour un modèle alternatif.
En vingt ans, cet écart s’est renforcé. Les premiers, avec l’assurance la plus chère, reçoivent maintenant 3000 francs de prestations, tandis que ceux qui ont choisi une franchise élevée paient 5000 francs. Ainsi, l'écart de solidarité a progressé de 2000 à 8000 francs depuis l'introduction de la LAMal. C'est une multiplication par quatre de ce facteur. Prendre une franchise élevée, c'est payer plus pour recevoir moins. Et cela, de plus en plus.
Je n’ai d’ailleurs jamais rencontré de personnes malades se plaindre du coût du système de santé. Il n’est pas rare que des patients puissent bénéficier en une année des prestations pour un prix plus élevé que l’ensemble des primes qu’ils paieront au cours de leur vie entière. Et c’est tant mieux, c’est ce que l’on appelle un système solidaire.
Mais cette solidarité a tendance à se casser. A être plus douloureuse. Précisément pour ceux qui y pourvoient. La prime d’une assurance-maladie avec une franchise élevée se calcule comme un ratio de l’assurance ordinaire, de la plus chère. Exemple: avec une franchise à 2500 francs, vous paierez 1540 francs de moins qu’avec une franchise à 300 francs. Et le calcul se fait à partir de cette dernière.
Dès lors, toute augmentation de la prime «de base» a des répercussions directes, dans la même proportion, pour la prime de ceux qui ont choisi des modèles à option. De ceux qui ne coûtent rien. Ou encore rien. Qui paient plus que ce qu’ils ne touchent. Et qui ont ainsi l’impression, à juste titre, que le système est toujours plus cher, sans leur apporter davantage.
En réponse à une de mes questions, le Conseil fédéral m’a exposé qu’en fixant la franchise minimale à 1500 francs, on diminuerait en moyenne l’ensemble des primes de 11.9%.
3.6 milliards de francs d’économie. Un mois et demi de primes en moins. Excusez du peu.
Puisque augmenter la franchise de base créerait un tollé, je propose une franchise de référence. Arrêter de calculer l’ensemble des primes en nous appuyant nécessairement sur le modèle d’assurance le plus cher, le plus luxueux, le plus large. Mais prendre comme référence un modèle d’assurance moyen, et non celui qui n’est plus choisi que par 20% de la population.
Avec une franchise de référence à 1500 francs, les personnes qui choisiraient un modèle plus étendu paieraient davantage. Et ceux qui ont adopté une franchise plus raisonnable pourraient enfin sortir, au moins partiellement, du cercle infernal des augmentations annuelles incontrôlées des primes maladies.
Cette proposition n’a pas encore trouvé de majorité à Berne. Dans le canton de Vaud, le modèle très socialiste de prime à 10% du revenu prend déjà comme référence les primes avec une franchise à 1500 francs. Peut-être que l’acceptation de ce modèle viendra de là où on l’attend le moins.