La mort peut attendre. Pékin a cessé d’annoncer les décès Covid-19 depuis Noël, laissant ce soin aux provinces.
A l’époque, le bilan officiel était de 5000 morts. Même l’OMS, peu encline à pointer des pays du doigt, critique ce décompte aberrant.
La société britannique Airfinity, spécialisée en intelligence prédictive, prévoyait entre 1 et 2 millions de morts en cas de levée des mesures, par analogie avec Hong Kong.
Trois anecdotes locales.
Les dabai, ces «hommes en blanc» qui testent et contrôle partout dans la rue depuis trois ans, ont tout bonnement disparu.
Sur les réseaux, les internautes malades se signalent avec un… mouton 🐑, qui se prononce comme le mot «positif» (/yáng/).
Malgré la censure, certains décès font grand bruit, comme celui de la chanteuse d’opéra Chu Lanlan (40 ans) ou le réalisateur Wang Jing Guang (57 ans).
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Le mot qui tue. «Covid? No one gives a fucking fuck, à part le personnel de santé ou quand il faut s’occuper de sa famille infectée», nous confie un expatrié français, dans une grande ville chinoise de la côte.
Vers un Nouvel An lunaire. Le retour des Chinois dans leurs familles pour le Nouvel An a débuté samedi. C’est la plus grande migration au monde: 2 milliards de déplacements sont attendus sur 40 jours.
De quoi porter l’épidémie au cœur des campagnes, auprès des parents âgés et vulnérables, où les hôpitaux – déjà débordés en ville – sont rares.
Sommet probable de la vague en Chine intérieure: d’ici fin janvier.
Place à la politique. La semaine dernière, pantomime à Bruxelles:
Plusieurs pays européens ont décidé de tester les voyageurs avant un vol: France, Italie, Espagne…
Objectif: identifier un éventuel nouveau variant venu de Chine.
Mais aucun consensus européen n’a émergé sur une décision contraignante, face à la pression de Pékin.
L’UE se borne à «encourager vivement» ses membres à demander un test Covid négatif aux voyageurs chinois, dans les 48 heures avant embarquement. Le résultat montre une Europe divisée, selon une ligne Est-Ouest pour l’essentiel.
Où le bât blesse. Dans un avis en date du 3 janvier, le CDC européen tempère le risque posé par la vague chinoise: le niveau d’immunité en Europe est déjà élevé, et les sous-variants Omicron détectés en Chine «circulent déjà dans l’UE».
Mais comme tout le monde, la Chine a levé le pied sur le dépistage. Or, la détection de nouveaux variants nécessite une politique active de séquençage et un partage transparent des données. Illusoire, s’agissant de Pékin.
Si les mécanismes restent discutés, tous les spécialistes disent que la probabilité d’émergence d’un nouveau variant est amplifiée par la circulation du virus. A bas bruit, la Chine est peut-être en train de produire le variant de demain.
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Du côté de Berne. Selon Le Temps, la Suisse attendait mollement la réaction de Bruxelles pour statuer sur l’attitude à adopter avec la Chine. L’enjeu est aussi diplomatique et économique: Pékin est le troisième partenaire commercial de la Confédération.
La décision est tombée mercredi 11 janvier, à l’issue de la première séance du Conseil fédéral de l’année. Il a ainsi été décidé:
de ne prendre aucune mesure visant à tester les voyageurs chinois avant embarquement, ou même à leur arrivée sur le territoire,
de s’en tenir à informer sur les mesures d’hygiène, notamment en recommandant le port du masque.
Dans son communiqué, le Conseil fédéral explique ce choix en reprenant les arguments du CDC européen, agrémentés d’un ajout maison:
«Le risque d’apparition de nouveaux variants préoccupants n’est pas plus grand en Chine qu’ailleurs.»
Une réflexion est aussi en cours du côté de Berne pour déterminer s’il y a lieu de contrôler les eaux usées de tous les vols arrivant directement de Chine afin d’y rechercher de nouveaux variants.
[Article mis à jour le 11 janvier 2023 à la mi-journée, pour intégrer la décision du Conseil fédéral.]