Les faits. Ils ne plaident pas pour l’affolement à ce stade.
Les mutations. Elles sont au nombre de 46 par rapport à la souche originelle du virus, dont 25 substitutions et 33 délétions. Mais le nombre de mutations en soi ne dit pas grand-chose du potentiel d’un variant. Omicron, par exemple, en comporte plus de 50. Il a fallu attendre les remontées épidémiologiques pour déterminer qu’il était très transmissible et capable d’échappement immunitaire. Même aujourd’hui, la situation n’est pas encore tout à fait claire.
Le nombre de cas détectés. Pour l’instant, seuls 20 génomes séquencés ont été transmis à la plate-forme Gisaid, la base de données mondiale employée par les virologues. La première séquence a été transmise le 4 novembre 2021, mais depuis début décembre, seule une nouvelle séquence a été ajoutée, ont rappelé les experts de l’OMS, cités par le New York Times.
En comparaison, le variant Omicron, ajouté sur Gisaid le 23 novembre 2021, compte désormais plus de 120’000 génomes séquencés. Comprendre: le variant IHU, loin de se diffuser massivement, semble plutôt s’éteindre, en compétition avec d’autres souches plus transmissibles. Comme l’a souligné Tom Peacock, virologue à l’Imperial College de Londres:
«B.1.640.2 est en fait antérieur à Omicron. (…) Ce virus a eu une chance raisonnable de faire des siennes, mais pour autant qu’on puisse le dire à ce stade, ça ne s’est jamais vraiment concrétisé. (….) Il n’y a aucun signe qu’il soit en train de prendre son envol.»
L’emballement. Malgré tout, une vague de désinformation a déferlé sur les réseaux sociaux, attribuant au variant davantage d’hospitalisations en Provence-Alpes-Côtes d’Azur, sans source crédible.
François Balloux, directeur de l’institut de génétique de l'University College de Londres et professeur de biologie computationnelle, ne décolérait pas sur Twitter:
«Pour qui serait tombé sur des tweets alarmistes à propos de B.1.640.2, il est temps de se détendre. (..) [Ce variant] n’est pas à l’origine d’une résurgence dans le Sud de la France, et n’a pas envoyé des centaines de personnes en soins intensifs en France.»
- There have been only ~20 B.1.640.2 sampled so far
— Prof Francois Balloux (@BallouxFrancois) January 3, 2022
(I used B.1.640 + S:E484K / S:P681H as a proxy)
- It was collected for the last time on Dec, 6th 2021
- It does not explain a spike of cases in Southern France
- It has not sent hundreds of people in ICU in France
2/ pic.twitter.com/2KOFxpwAkt
Une part de l’affolement, outre-Atlantique tout du moins, semble être partie d’une série de tweets d’un épidémiologiste américain très suivi, et qui ont depuis été supprimés.
L’affaire a malgré tout pris d’incroyables proportions. Le 3 janvier, l’OMS a dû rappeler que B.1.640 avait été placé sous surveillance (Variant Under Monitoring) dès sa découverte en novembre 2021.
Interrogé sur ce point lors de son point presse hebdomadaire le 4 janvier, l’OFSP a déclaré ne pas être inquiet de la situation.
Les précédents. A noter que l’équipe de l’IHU Méditerranée n’en est pas à un coup d’essai quant au fait de vouloir donner au Sud de la France «son» variant. En 2021, une équipe du même institut faisait état d’un autre variant, cette-fois baptisé Marseille-4…