Une année si particulière. Pour une fois, ce n’est pas le calendrier habituel des événements (conférences de presse, meetings d’athlétisme, championnats du monde divers, etc.) qui a dicté nos journées. C’est le virus qui nous a poussé à renouer avec la base la plus noble de notre métier: photographier la vie, observer l’humain dans son quotidien chamboulé.
Comment font les artisans confinés, les acteurs sans scène, les candidats sans campagne, les libraires aux magasins fermés, les sportifs sans entraînement? Le match de football le plus ordinaire – pour autant qu’il ait eu lieu – nous a offert des situations inédites: stade vide, prise de fièvre.
Tout avait pourtant débuté avec un WEF classique, lors duquel personne ne voyait rien venir et où les puissants de ce monde se faisaient encore des politesses. Avant que tout bascule…
Quelques moments forts de mon année. Le 2 mars, le masque fit soudain son apparition. La conseillère nationale Madgalena Martullo-Blocher, pendant la session de printemps, échange avec la présidente du Conseil National, Isabelle Moret, sur le droit de porter un masque dans l’hémicycle. Une scène qui a beaucoup fait parler en Suisse. Peu après, la session sera interrompue à cause de la pandémie.
Le 20 avril, je me suis retrouvé dans un Super Puma de l’armée suisse volant vers les Grisons, avec à son bord le ministre de la Santé Alain Berset.
Difficile de ne pas se sentir seul… Quand finalement les Young Boys sont sacrés champions de Suisse de football, le 31 juillet à Sion, leur entraîneur Gerardo Seoane fête la victoire avec un cigare, devant le secteur des fans de YB, vide pour cause de pandémie. Scène surréaliste.
29 novembre. Très vite, cette crise a fait naître des critiques, des sceptiques, des adeptes des théories du complot. Ici un candidat au Parlement de la ville de Berne qui refuse de porter un masque et provoque l’intervention sur place des policiers, le 29 novembre, jour des élections communales.
Et tant d’autres images fortes, pour moi mais également pour mes collègues, à découvrir ici.
Professionnalisme bradé. Le photojournalisme n’a jamais été un oreiller de paresse. Nous sommes depuis toujours remis en question et même régulièrement donnés pour morts. La télévision, le numérique, la vidéo, les smartphones, tout devait avoir raison de notre profession. Mais nous sommes toujours là!
Aujourd’hui, c’est le choix de certains grands éditeurs de brader le professionnalisme des photographes qui nous menace. Mais nous sommes convaincus d’avoir notre place à défendre.
Grâce à l’internet, la photo documentaire bénéficie de plus de vitrines que jamais et jouit d’une popularité énorme. La déontologie du photojournaliste d’agence nous oblige à la recherche de la vérité: l’origine de la photo est transparente et traçable, la photo en elle-même n’est pas trafiquée ni retouchée d’aucune façon.
La crise actuelle a accentué le besoin du public d’obtenir des informations vérifiées, et c’est vrai pour la photographie également. L’image de doit pas simplement être bien composée d’un point de vue esthétique, mais elle doit montrer la réalité la plus objective possible.
Qualité et éthique sont deux valeurs plus pertinentes que jamais. Elles accompagnent tous les membres de mon équipe qui, à leur tour, vous parlent de cette année.