A l’école de cirque de Naplouse, répondre à la haine par la scène
L’armée a sorti les chars, ils ont répondu avec des nez de clown. Pendant la seconde Intifada, au début des années 2000, des artistes palestiniens ont décidé de réinvestir l’espace public en jouant dans les rues de Naplouse, au nord de la Cisjordanie. De ce projet est née l’école de cirque Assirk Assaghir. Un espace où l'on cultive l'art de la pirouette comme celui du lien social.
Le visage de Noor, 22 ans, aurait pu être de ceux que Naplouse honore à chaque coin de rue. Il a l’âge des martyrs dont le portrait se décline en posters, graffitis et médaillons, de cette génération qui tue et se fait tuer. Dans cette ville de Cisjordanie où il vit et a grandi, la lutte armée contre l’occupation israélienne connaît un nouvel essor ces derniers mois, porté par les jeunes insurgés, ici très populaires, de la Fosse aux lions.
Noor, lui, préfère l’acrobatie aux kalachnikovs. Quand les Lions de Naplouse rugissent, il préfère apprendre à ses élèves, de jeunes Palestiniens de l’école de cirque Assirk Assaghir, à marcher sur les mains. La scène plutôt que la haine.
Ce mercredi après-midi de février, une dizaine d’enfants attendent patiemment que Noor les aide à se mettre en équilibre, tête en bas. Sarah, Jemma, Amad et les autres se rendent deux fois par semaine dans la bâtisse, située à quelques minutes à pied de la vieille ville, pour leurs cours de cirque. Noor les connaît bien, il les entraîne. «C’est comme la famille», sourit-il entre deux passages.
Huit ans déjà que le jeune homme arpente ces locaux. Entre les cours, il a eu l’occasion de partir avec la troupe à l’étranger et de se rêver circassien de métier. Son amour de l’acrobatie et de la danse, il le dit mieux avec son corps, qui se balance avec aisance entre des sangles aériennes. Les mots, eux, sont succincts — «le cirque, c’est créatif et ça permet de s’exprimer en toute liberté».