Voleur de sable, métier d'avenir
Le besoin massif de sable pour le béton entraîne des dommages considérables à l’échelle de la planète. Il en existe deux types, le sable statique qui se trouve sur terre, et le sable dynamique des rivières, des plages et des fonds marins. Alors que le sable statique facile à extraire est devenu une denrée rare, les bétonneurs s’attaquent désormais à celui, dynamique, qui entraîne des conséquences environnementales et sociales qui dépassent l’entendement. Et son extraction n’est quasiment pas régulée à l’échelle mondiale. Bienvenue au far-west.
Une nuit de l'hiver 2008, des pêcheurs de la côte ouest de la Jamaïque ont été réveillés par un raffut de tous les diables sur la plage qui longe leur village. Ils accoururent et découvrirent des camions et des pelleteuses qui s’affairaient à vider la plage de son sable, un véritable hold-up. Certains pêcheurs essayèrent de s’interposer: «Arrêtez de voler notre sable!». Mais ils furent chassés par des hommes armés. Le lendemain, la plage était réduite à une peau de chagrin.
Cette histoire a été racontée par les villageois qui l’ont vécue à Pascal Peduzzi, scientifique genevois de l’environnement et directeur du GRID-Genève (Programme des Nations Unies pour l'Environnement). A cette époque, Pascal Peduzzi dirigeait l’unité chargée d’identifier les menaces émergentes pour l’environnement et il était en mission en Jamaïque pour étudier les raisons de l'érosion de la plage de Négril, la plus grande et la plus belle de l'île, à laquelle le pays doit 6% de son PIB, grâce au tourisme. Le sable va alors apparaître dans son radar.
«C’est durant cette mission, lorsque l’on m’a raconté que l’on pouvait porter atteinte à l’intégrité physique d’une personne pour se procurer gratuitement du sable, que j’ai pris conscience de la valeur économique de cette matière», m’explique Pascal Peduzzi confiné chez lui, par visio-conférence. «Le sable, c’est mon combat, je suis intarissable sur la question» met-il en garde au bout de deux heures de discussion.
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