J’ai confié ma vie à un traitement mis au point par un dandy géorgien et un aventurier parisien
Dans ce deuxième épisode, notre journaliste se découvre une fascination pour le Français Félix d’Hérelle, père de la phagothérapie, et le Géorgien George Eliava, son disciple qui importa la phagothérapie en URSS dans les années 1930 et lui permit ainsi de résister à la grande vague des antibiotiques. Sans surprise, le destin de ces deux hommes allait mal tourner. Le premier gesticulera en vain, convaincu de l’importance de ses découvertes mais raillé par ses pairs, le second sera tout simplement abattu par un sbire de Staline. Avec des origines pareilles, peut-on s’étonner que la phagothérapie peine à s’institutionnaliser?
J’ai longtemps imaginé le scientifique cloîtré dans un laboratoire. Jouant avec des petites pipettes colorées. Se baladant le dos courbé dans des couloirs gris, éclairés par des néons. Ne voyant jamais la lumière du jour. Une goutte à gauche, une goutte à droite, puis de temps à autre, la rédaction d’un compte-rendu répétant une seule et même observation à l’infini. Ça, c’était jusqu’à ce que je fasse la connaissance livresque de Félix d’Hérelle, né en 1873 et considéré comme le père de la phagothérapie.
Sa vie à lui se résume plutôt par une suite de bagarres, d’aventures et de coups du sort. Il faut s’imaginer un chien fou à la Sylvain Tesson, qui vécut dans les contrées les plus reculées de ce monde, les plus dangereuses aussi, au Guatemala, en Inde, au Mexique, en Argentine. Irrésistiblement attiré par les microbes et la mort, l’annonce de chaque nouvelle épidémie le faisant trembler d’excitation.