Réservé aux abonnés

Grégoire Mangeat: «L'intelligence artificielle va enfin permettre un véritable accès au droit»

Grégoire Mangeat a été bâtonnier de l'Ordre des avocats de Genève. | Jeremy Spierer

Les IA génératives comme ChatGPT s'apprêtent à bouleverser un grand nombre de professions intellectuelles. Les avocats n'y échapperont pas, on le voit déjà. Faut-il craindre ce changement? Pas selon Grégoire Mangeat, ancien bâtonnier de l'Ordre des avocats de Genève.

L’ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats de Genève, Grégoire Mangeat, se dit assez fasciné par les perspectives offertes par les intelligences artificielles génératives, telles que ChatGPT. Selon lui, elles favoriseront dans le futur l’accès au droit du plus grand nombre. Mais pour répondre efficacement aux changements que va apporter cette technologie, il plaide pour une adaptation des règles de la profession, dont certaines sont à ses yeux trop rigides.

Heidi.news — Est-ce que les IA génératives vont finir par remplacer les avocats?

Grégoire Mangeat — Certainement pas. En tout cas pas pour le travail à haute valeur ajoutée qu’offre l’avocat. En revanche, de tels outils seront indispensables pour améliorer la qualité des services fournis par l’avocat. La recherche juridique et la génération de documents seront facilitées, beaucoup plus rapides. Des analyses juridiques plus ou moins complexes seront possibles et donneront des résultats de qualité.

Donc plutôt que de plonger son nez dans d’épais livres juridiques, l’avocat élaborera des «prompts» (des requêtes à l’IA, ndlr.) pour effectuer son travail de recherche?

Non, je reste convaincu que la qualité des réponses fournies par la machine dépendra avant tout de la qualité des interactions entre l’avocat et cette machine. Et la qualité de ces interactions dépendra en grande partie de la qualité de la culture juridique de l’avocat. Certains futurologues de la profession prétendent qu’il sera bientôt devenu inutile d’apprendre des règles de droit ou des principes dégagés par la jurisprudence. Je ne suis pas du tout d’accord.

  • Pour poser de bonnes questions à la machine, il faudra être un bon juriste.

  • Pour alimenter la machine avec les bons documents et améliorer ainsi ses capacités, il faudra être un bon juriste.

  • Idem pour identifier les erreurs, les biais, ou les simples approximations de la machine, ainsi que pour établir des parallèles, des analogies que la machine n’aurait pas identifiées.

Plus la machine sera «intelligente», plus l’avocat devra être «à la hauteur» de celle-ci, meilleur, toujours meilleur… L’avocat devra par ailleurs garder sa longueur d’avance dans le registre des émotions et de la création de confiance, des terrains plus intimement humains et très importants dans notre profession.

Et pour le grand public, est-ce vraiment une bonne chose que de pouvoir interroger une machine sur des enjeux juridiques souvent complexes?

Pour la plupart des gens, cette technologie va enfin permettre un véritable accès au droit, ce qu’internet seul rendait encore assez compliqué. Les gens pourront beaucoup plus facilement connaître leurs droits et leurs devoirs. Or l’accès au droit est le préalable indispensable pour ensuite le faire respecter. Que la technologie permette tout d’un coup une augmentation significative de la conscience, par le plus grand nombre, de ses droits et obligations, c’est vraiment fascinant.

Mais justement, si les gens connaissent mieux leurs droits, pourquoi s’embarrasser des services onéreux d’un avocat?

Cet article est réservé aux abonnés.

Pour lire la suite de cet article et des milliers d'autres, abonnez-vous à partir de CHF 16.- par mois.

Le journalisme de qualité nécessite du temps, de l'investigation et des moyens. Heidi.news est sans publicité. L'avenir de votre média dépend de vous.

Je profite des 30 premiers jours gratuits

Les bonnes raisons de s’abonner à Heidi.news :

  • Un mois d’essai, sans engagement sur votre premier abonnement
  • La newsletter le Point du jour édition abonnés
  • Les archives en illimité
  • Des échanges avec nos journalistes