Les Verts se sont battus dès les premiers débats pour que cette taxe dite «sur l’aviation générale» s’élève par vol en partance au maximum à 20'000 francs. La somme peut paraître excessive, mais ce qui est réellement excessif, c’est le prix que les clients privés sont prêts à dépenser pour un vol en jet privé. Pour exemple, un vol aller/retour Paris-New-York coûte 100'000 francs, Moscou-Nice 30'000 francs, Londres-Ibiza 18'000 francs, Genève-Pékin 140'000 francs. Si les propriétaires de l’avion privé achètent du temps, de la flexibilité et du confort, ils doivent être prêts à payer cette liberté, car elle a un coût sur l’environnement. En l’état, la position majoritaire du Conseil national est d’étendre la taxe à 5'000 francs, celle du Conseil des Etats de la limiter à 500 francs. La discussion est pour l’heure ouverte.
Par ailleurs, si les Verts ont réussi à apporter dans les premières lectures de la loi le principe pour la FINMA et la BNS d’évaluation des risques climatiques sur les flux financiers, le pas suivant n’a malheureusement pas été franchi lors des dernières négociations, celui d’inscrire dans la loi le caractère public du résultat de ces évaluations et l’apport de mesures adéquates.
De manière générale, la révision de la loi sur le CO2, loin d’être un pas de géant, pose les jalons d’une politique climatique. Si le texte ne va aujourd’hui ni assez loin, ni assez vite, il va au moins dans la juste direction, raison pour laquelle il faut soutenir cette loi. À elle seule, la loi CO2 ne parvient pas à atteindre le projet zéro émissions nettes de CO2 d’ici 2050. Pendant le débat, plusieurs tentatives pour rétablir la justice climatique ont malheureusement échoué, alors que toutes n’étaient que cohérence avec les engagements internationaux que nous avons pris à Paris.
Concrètement, que propose la loi et quels changements apportera-t-elle?
Un objectif de réduction des émissions de CO2 pour 2030 d’au moins 50 % dont trois quart à réaliser en Suisse.
Une taxe incitative sur les billets d’avion de 30 à 120 francs et sur les vols en jets privés de (dont le montant est à confirmer) : la moitié de ces taxes sera redistribuée «cash» à la population et l’autre moitié alimentera un fonds climat.
La création d’un fonds climat: il permettra de financer le développement des énergies renouvelables, d’assurer la protection contre les dégâts climatiques et le remplacement des chauffages à mazout ou électriques.
L’assainissement du parc automobile: dès 2030, les voitures importées devront consommer moins d’essence qu’aujourd’hui.
L’augmentation de 10 centimes le litre d’essence: soit quelques francs de plus pour un plein d’essence d’une voiture de tourisme.
L’augmentation de la taxe incitative CO2 sur le mazout de 120 francs/tonne de CO2 à 210 francs/tonne de CO2: les deux tiers de la recette de la taxe seront redistribués à la population et aux entreprises tandis que le tiers restant alimentera le programme d’assainissement des bâtiments et une partie du fonds climat.
La fin du chauffage à mazout: dès 2023 lors de remplacement de chauffage.
Grâce à la redistribution des taxes incitatives sur le mazout et les vols en avion, 70 à 90% de la population gagnera plus de la redistribution que ce qu’elle n’aura dépensé en taxes, d’après les études Sotomo. Sans même parler du prix du baril de pétrole, qui a rarement été aussi bas, et des voitures qui consommeront moitié moins.
La révision totale de la loi sur le CO2 nous donne ici l’opportunité de faire un pas dans la bonne direction, de franchir un cap. Ce n’est pourtant ni l’unique outil, ni la réponse à tous les maux. Nous comptons déjà sur l’initiative des glaciers, la politique agricole 2022 ou les initiatives sur les pesticides et, bien sûr, la pression de la rue pour poursuivre le travail! Les enjeux sont de taille et ne répondent pas seulement à une aspiration politique mais bien à une urgence vitale.