Grâce au GYBN, de jeunes délégués suisses ont pu participer au sommet pour la première fois dans l'histoire de la Convention sur la diversité biologique. Cette dernière a vu le jour en 1992, au sommet de la Terre à Rio de Janeiro.
Quand les jeunes deviennent lobbyistes
Rencontrer des personnes des quatre coins du monde, ainsi qu'échanger nos points de vue et partager notre intérêt pour la biodiversité de la Terre, n’a pas seulement été enrichissant, mais aussi un levier politique efficace. Au cours des deux dernières semaines, les jeunesses du monde ont pu remporter quelques succès par le biais de lobbying politique, de campagnes et d'actions. Cela nous confirme que la jeunesse est définitivement capable d'apporter une contribution pertinente même à travers de tels canaux.
En effet, le Réseau mondial de la jeunesse est officiellement considéré comme un observateur des négociations et a donc le droit d'intervenir. Cela signifie que nous sommes autorisés à introduire des propositions de changement dans les négociations, qui ne seront toutefois traitées que si au moins un pays les soutient. Jusqu’à présent, pour que les jeunes puissent participer directement à la table des négociations, ils dépendaient de la bonne volonté des pays. Certaines délégations, comme celles du Danemark, du Mexique ou de la République dominicaine, ont déjà intégré des représentants de la jeunesse dans leurs rangs. Mais pas la Suisse.
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Une place pour la jeunesse dans la délégation suisse?
Nous souhaitons que la jeunesse suisse fasse aussi partie intégrante de la délégation nationale. Une demande transmise à la directrice de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) Katrin Schneeberger, lors d’un entretien personnel pendant la COP15.
Il est temps que les jeunes soient perçus comme des citoyens à part entière. Nous voulons avoir notre mot à dire dans les négociations qui concernent notre avenir.
Notre vision: que nos modes de vie puissent respecter la nature, et que notre système économique – qui se base aujourd’hui sur le mythe d’une croissance infinie – se transforme pour s’aligner à une société socialement et écologiquement durable. Pour ce faire, nous demandons trois points:
L'équité intergénérationnelle (principe selon lequel on doit tendre à l'égalité dans la répartition du bien-être entre les générations, ndlr.)
Un système éducatif qui prend compte de ces nécessaires transformations socio-environnementales
Des approches économiques, juridiques et politiques basées sur les droits des personnes et de la nature.
Quand le climat éclipse la biodiversité
On l’a bien vu: le sommet onusien pour le climat (COP27), qui s’est terminé en novembre, a reçu davantage de visibilité que la COP15 sur la biodiversité. D'une part, cela s'explique par le fait que la diversité de la vie sur notre planète est bien plus complexe à comprendre que l'idée qu’il suffit de réduire les émissions de CO2 pour lutter contre la crise climatique. Mais aussi, d’autres crises viennent toujours éclipser les questions environnementales, que ce soit la pandémie, l’invasion en Ukraine ou le risque actuel d’une pénurie de gaz et d’électricité.
Il est donc d’autant plus important d’avoir une voix pour lutter contre l’érosion du vivant. C’est pourquoi nous aimerions créer une section suisse au Réseau mondial des jeunes pour la biodiversité. Les jeunes doivent pouvoir acquérir des compétences pour s'engager politiquement et attirer l'attention sur la perte de la biodiversité. D’ailleurs, contrairement au Sommet mondial sur le climat, où les jeunes délégués ne sont autorisés à suivre les négociations qu’à travers des écrans interposés, la COP sur la biodiversité est beaucoup plus accessible et permet une présence dans les salles de négociations.
Une négociation finale ambivalente
A nos yeux, la négociation finale s'est déroulée de manière très opaque. Après 8 heures de retard, le nouveau Cadre mondial pour la biodiversité a été présenté tôt lundi matin en séance plénière. Il était convenu que les Etats pourraient commenter le texte et que chaque objectif serait accepté individuellement. La République démocratique du Congo (RDC) a utilisé son droit, en se montrant critique à l'égard de la cible de financement Pourtant, le président chinois de la conférence a habilement ignoré cette opposition, en déclarant que le texte dans son ensemble était accepté, avant de rapidement clore les négociations. Des applaudissements ont suivi, comme si rien ne s’était passé.
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Selon le responsable judiciaire de la Convention, l'objection de la République démocratique du Congo n'était pas formelle et n'a donc pas été acceptée. Nous avons eu du mal à croire à une telle injustice, tout comme l'Ouganda et la Namibie, proches de la RDC.
La crise de la biodiversité est bien plus qu'une simple crise environnementale. Il s’agit, entre autres, de la conséquence socio-environnementale du colonialisme exercé par les pays du Nord globalisés, mais aussi d’un mode de pensée déséquilibré et avare issu du capitalisme.
Nous nous réjouissons de la nouvelle convention-cadre mondiale sur la biodiversité, qui servira de guide aux États signataires pour protéger l'environnement.
Cependant, la biodiversité terrestre et océanique ne pourra perdurer sans un changement de système profond. Le revers de la négociation finale n'est qu'un exemple parmi d'autres qui nous montre que le chemin est encore long.