«De nombreuses personnes veulent renoncer à la voiture, mais manquent d’alternatives»
Face à la crise climatique et énergétique, la mobilité se réinvente. L'EPFL a lancé une étude inédite pour mesurer l'évolution des comportements de 10'000 personnes dans l'Arc lémanique franco-suisse. Interview avec Vincent Kaufmann, professeur en sociologie urbaine, qui coordonne le projet.
Les transports pèsent lourd dans l’empreinte carbone de la Suisse: le secteur est le plus gros émetteur de gaz à effet de serre du pays. Si la mobilité a un train de retard pour relever les défis climatiques, ce n’est pourtant pas par absence d’envie de la population. Une grande partie des citoyens se disent d’ailleurs prêts à renoncer à la voiture, mais le territoire, construit autour de l’automobile, leur mettrait parfois des bâtons dans les roues.
Pour identifier des leviers d’action publique pour faciliter la transition des ménages vers la neutralité carbone, l’EPFL a décidé de recenser l’évolution des habitudes de mobilité de 10’000 personnes domiciliées dans l’arc lémanique franco-suisse. Un projet de recherche sur cinq ans, baptisé «Panel lémanique», qui est piloté par la Faculté de l’environnement naturel, architectural et construit (ENAC) de l’EPFL, en collaboration avec les cantons de Vaud, de Genève, et le Grand Genève.
Heidi.news s’est entretenu avec Vincent Kaufmann, professeur de sociologie urbaine et d'analyse des mobilités à l'Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL), et directeur scientifique du Forum Vies Mobiles.
Heidi.news – Le «Panel lémanique» lancé par l’EPFL recensera pendant cinq ans les habitudes en matière de mobilité de 10’000 personnes domiciliées sur l’arc lémanique franco-suisse. D’où est venue l’idée d’une telle enquête?
Vincent Kaufmann — Plusieurs recherches récentes démontrent que la simple optimisation technologique de secteurs comme le parc automobile et le bâti ne permettra d’atteindre qu’à hauteur de 50% les objectifs de l’accord de Paris sur le climat. Deux autres stratégies complémentaires doivent être explorées: le changement des modes de vie et la sobriété.
Or il existe très peu de données chiffrées sur les leviers des changements de comportements, et les rares qui existent sont souvent récoltées de manière non coordonnée. Cette grande enquête remédiera à cela, en élaborant une base de données qui servira à la recherche à échelle mondiale. Elle pourra également faire évoluer les politiques publiques, comme l’aménagement du territoire et la mobilité, dans un sens vertueux.