Son élection au poste précédemment occupé par Simonetta Sommaruga (PS) avait suscité de vives critiques de la communauté scientifique et de la gauche écologiste, qui brocarde son passé de lobbyiste du pétrole — et du nucléaire.
Dans son mot de bienvenue, le ministre s’en est tenu à la ligne du Conseil fédéral:
«Améliorer l’approvisionnement en électricité n’est pas seulement important pour la sécurité énergétique du pays, mais aussi pour le réchauffement climatique. Pour sortir du fossile, nous devons avoir davantage d’électricité.»
Produire plus, et localement. Pour le ministre, la Suisse est «trop dépendante des importations, notamment d’électricité» — une stratégie qui devient problématique dans un contexte comme la guerre en Ukraine, et qu’il juge «pas durable».
«Pour cet hiver nous pouvons dire que la situation est gérable. Mais l'hiver prochain approche déjà à grands pas», note le conseiller fédéral bernois, avant d’appeler à sécuriser l’accès aux ressources électriques domestiques:
«Il ne faut pas seulement produire davantage d’électricité en Suisse, mais aussi créer des réserves pour tous types d’énergie, dont le gaz (une énergie fossile, ndlr.).»
Lever les boucliers. A moyen terme, il sera question d'accélérer la transition vers les énergies renouvelables, comme le solaire et l’hydraulique, affirme-t-il:
«Les énergies renouvelables sont non seulement positives pour le climat, mais elles favorisent aussi la sécurité d'approvisionnement du pays.»
Plusieurs projets d’énergie renouvelable, comme le complexe éolien de Sainte-Croix dans le Jura vaudois, peinent à se concrétiser face aux oppositions locales. Des barrières que le conseiller fédéral appelle à lever, en martelant:
«Les intérêts nationaux doivent prévaloir sur la protection du paysage. (…) Nous devons accélérer les procédures pour que les petites organisations régionales ne puissent plus bloquer ces projets.»
Du renouvelable et du… nucléaire. Reste à savoir sur quels axes développer le secteur électrique. Si le conseiller fédéral mise sur une expansion rapide de l'hydroélectricité et du photovoltaïque, ainsi que de la biomasse, il ne ferme pas la porte au nucléaire.
Evoquant une durée de vie de 60 ans pour les réacteurs nucléaires encore en activité, Albert Rösti cite le cas de la centrale de Leibstadt (AG), qu’il estime pouvoir rester connectée au réseau pendant encore 20 ans. «Il faut éviter une sortie prématurée de cette énergie», revendique-t-il, marquant son opposition aux fermetures précoces de centrales.
Comme celle de Mühleberg, fermée après 47 ans d’exploitation en raison de coûts de maintenance élevés.
Des nouvelles centrales? Le ministre espère débloquer des investissements supplémentaires pour la mise à niveau des centrales existantes, permettant d’aller au bout de leur temps de fonctionnement. A moyen terme, l’atome pourrait faciliter la transition vers les énergies renouvelables, note-t-il, sans trop s’avancer:
«A long terme, je reste prudent. Si nous souhaitons décarboner tout le pays nous allons avoir besoin d’énormément d’énergie supplémentaire — où la chercher?»
Entre les lignes, Albert Rösti pourrait faire référence à l’ouverture de nouvelles centrales. En 2017, le peuple suisse a voté en faveur d’une sortie progressive de l’atome, en interdisant la construction de nouveaux réacteurs.
«Cela n’a aucun sens de se disputer aujourd’hui pour l’avenir, on pourra en rediscuter d’ici quelques mois, précise-t-il d’un ton badin. Aujourd’hui, nous savons simplement que nous devons produire davantage.»
Les points aveugles. La sobriété énergétique, levier essentiel pour limiter le réchauffement climatique et assurer la sécurité d’approvisionnement selon les experts du Giec, était la grande absente du discours du nouveau conseiller fédéral.
A noter que son parti, l’UDC, s’oppose à une sortie totale des énergies fossiles et dépose ce jeudi 19 janvier un référendum contre la loi sur le climat, qui prévoit d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. L’ancien conseiller national Albert Rösti s’était fermement opposé à ce contre-projet ficelé par le gouvernement et faisait partie de la coprésidence du comité référendaire.
Dans son nouveau costume de chef de la DETEC, il devra défendre la loi en question contre son propre camp.