Les résultats. Ils sont globalement fidèles aux derniers sondages, qui faisaient état d’un écart diminuant entre Macron et Le Pen:
Emmanuel Macron (La République en marche) 27,60%
Marine Le Pen (Rassemblement national) 23,41%
Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) 21,95%
Eric Zemmour (Reconquête) 7,05%
Valérie Pécresse (Les Républicains) 4,79%
Yannick Jadot (Europe écologie les Verts) 4,58%
Jean Lassalle (Résistons) 3,16%
Fabien Roussel (Parti communiste) 2,31%
Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France) 2,07%
Anne Hidalgo (Parti socialiste) 1,74%
Philippe Poutou (Nouveau parti anticapitaliste) 0,77%
Nathalie Arthaud (Lutte ouvrière) 0,57%
Trois sur cinq. L’extrême-droite française se retrouvera donc vraisemblablement au second tour pour la troisième fois sur les cinq dernières présidentielles (après Jean-Marie Le Pen en 2002 et, donc, après 2017). Un état de fait qui est le fruit de facteurs multiples, notamment de la désagrégation du centre-gauche et plus particulièrement du Parti socialiste, mais qui dessine aussi un succès réel à mettre au crédit de la mouvance ex-frontiste. D’autant plus si l’on repense à l’élection de 2007 qui, si elle avait vu Jean-Marie Le Pen échouer au premier tour, avait quand même vu la victoire d’un Nicolas Sarkozy au programme taillé afin de séduire très à droite.
Mais quel barrage? En 2002, la stupeur avait fait place à une ralliement national en faveur de Jacques Chirac, enterrant les espoirs de Le Pen père, finalement battu avec 17,79% des voix seulement. En 2017, l’appel à «faire barrage au Front national» avait encore joué, mais de manière moins nette, Le Pen fille ayant récolté 33,9% des voix. Qu’en sera-t-il le 24 avril?
Le problème avec l’argument du «barrage» est qu’il requiert un contraste fort, en l’occurrence ici entre un candidat qui incarnerait la démocratie et la République et une autre qui serait un danger pour ces deux concepts, voire un mal absolu. Mais qui oserait affirmer à coup sûr, en ces temps de défiance, de crises et de fractures, que le président Macron représente encore pour une (large) majorité de Français la meilleure des deux options — ou la moins pire des deux?
Une campagne habile. Surtout que l’actuel pensionnaire de l’Elysée, à trop vouloir se présenter comme l’homme au-dessus de la mêlée, a non seulement privé ses administrés d’un débat digne de ce nom, mais a donné de lui l’image d’un politicien loin de ses concitoyens. Tout le contraire de Marine Le Pen, dont la campagne axée sur la proximité avec les gens, dans une habile mise en scène, a démarqué la candidate RN de ses concurrents.
Nul doute que la radicalité de la pensée d’Eric Zemmour — un idéologue dont la posture laisse supposer qu’il n’aime que très modérément le «bas peuple» — a également fait le lit du bon score de Marine Le Pen. Laquelle peut raisonnablement espérer un report en sa faveur des voix de son concurrent direct à l’extrême-droite. Mais aussi des électeurs de Nicolas Dupont-Aignan ou d’une partie de ceux de Valérie Pécresse, ainsi que celles des nombreux déçus et oubliés du système — qui sont un important fonds de commerce du candidat Mélenchon.