L’AG de ma société ne peut avoir lieu physiquement: puis-je organiser une assemblée virtuelle?

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La question. L’assemblée générale de ma société ou association ne peut pas avoir lieu physiquement: puis-je organiser une assemblée virtuelle?

La réponse deMe Vincent Pfammatter, avocat, étude Sigma Legal. Le 19 mars dernier, le Conseil fédéral modifiait l’Ordonnance 2 Covid-19, interdisant avec effet immédiat toutes les manifestations publiques ou privées, et ce au moins jusqu'au 19 avril 2020. Impossible donc, pour une société, une coopérative ou une association de tenir en personne son assemblée générale durant cette période. Quant à la période qui suit le 19 avril 2020, l’incertitude règne encore, car nul ne sait si ces mesures seront prolongées, et, le cas échéant, pour combien de temps.

Le Conseil fédéral a toutefois prévu une solution alternative intéressante : l’article 6a de l'Ordonnance 2 Covid-19 octroi en effet au conseil d’administration (ou au comité, dans le cas d’associations) la possibilité d’organiser des assemblées générales virtuelles.

En substance, l’exception introduite permet d’offrir aux actionnaires / membres la possibilité d’exercer leurs droits sociaux (prendre part, poser des questions, voter), par écrit, par un moyen électronique, par exemple la vidéoconférence, ou par l'intermédiaire d'un représentant tiers.

Quelques points sont à garder à l’esprit, pour qui veut tenter l’aventure de l’assemblée générale virtuelle :

  • L’assemblée générale doit avoir lieu à une date et en un lieu définis, mais il n'est pas nécessaire qu'elle ait lieu physiquement (en personne).

  • Les règles applicables à la forme de l'invitation restent applicables (par exemple, envoi d'un ordre du jour à l'avance). Toutefois, l'Ordonnance 2 Covid-19 permet aux actionnaires / membres d'être informés des mesures prises pour la participation à distance jusqu'à quatre jours avant la réunion.

  • Les règles applicables aux processus de vote doivent être respectées (quorum, majorités statutaires, calcul des abstentions, etc.).

  • Les décisions prises au cours de ces assemblées générales virtuelles devront être dûment consignées dans un procès-verbal.

  • D’un point de vue pratique, il est selon nous souhaitable de prendre des précautions afin d'éviter des problèmes de preuve et de remise en question de la validité du processus choisi. Si l’assemblée générale se tient de manière électronique, une plateforme doit permettre aux  actionnaires / membres de s’identifier formellement, de suivre les débats, de poser des questions, puis de voter de manière claire. Si l’option de l’assemblée générale par écrit est retenue, les actionnaires / membres doivent pouvoir poser des questions et s’informer sur les points à l’ordre du jour avant qu’ils ne soient soumis au vote, puis ils doivent pouvoir retourner leur vote par un moyen déterminé à l’avance (courrier, scan, etc.). Le conseil d’administration /comité doit prendre les mesures nécessaires pour s’assurer de l’identité des votants, par exemple en leur soit demandé de signer et de dater leur bulletin de vote, voire de l’accompagner d’une copie d’une pièce d’identité.

Quand organiser l’assemblée générale virtuelle ?

Une assemblée générale virtuelle peut avoir lieu après la période de validité de l'Ordonnance 2 Covid-19 (soit après le 19 avril 2020), à condition que la décision de la tenir ait été prise pendant la période de validité de l'ordonnance. Ce n’est donc pas le moment de l’assemblée générale qui est relevant, mais celui de la prise de décision.

Le Conseil fédéral autorise donc la tenue d’assemblées générales virtuelles, ce qui constitue une possibilité encore inédite en Suisse. Bien que les moyens technologiques existent depuis longtemps, le droit suisse tardait à autoriser formellement la validité d’assemblées virtuelles (la révision du droit de la SA est en cours). Le principe de l’immédiateté dans l’exercice des droits sociaux, à exercer dans une assemblée physiquement réunie, demeurait la règle.

Parfois donc, l’urgence provoquée par une crise permet de tester de nouvelles solutions, et de faire évoluer les pratiques.

Pour plus d’information, notamment sur les particularités liées à chaque type d’entité (SA, Sàrl, Société coopérative, association), voir la publication de l’Office fédéral de la justice «FAQ Coronavirus et assemblées générale»

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  • La rédaction sélectionne les questions faisant l’objet d’une publication. Il n’y a pas de droit d’obtenir une réponse à chaque question.

  • Les réponses publiées ne constituent pas un conseil juridique personnalisé.