Je travaille avec des horaires irréguliers dans le domaine culturel, puis-je réclamer mon salaire?

La crise du coronavirus met de nombreuses entreprises et salariés en grande difficulté. Des mesures de soutien ont été décidées et connaître ses droits est plus important que jamais. Heidi.news crée un nouvel espace de questions-réponses juridiques, en partenariat avec l’étude d'avocats SIGMA LEGAL (Genève et Lausanne). Posez-vos questions à l’adresse redaction@heidi.news

La question complète. Je travaille avec des horaires irréguliers dans le domaine culturel (théâtre). Toutes les représentations ont été annulées et mon employeur a cessé de me solliciter. Puis-je lui réclamer de payer mon salaire?

La réponse de Me Kevin Guillet, avocat, étude Sigma Legal (Genève et Lausanne). Nous partons du principe que la personne est liée au théâtre par un contrat de travail, de sorte qu’elle ne fournit pas ses services en tant qu’indépendant, et que le contrat de travail n’est pas à temps partiel puisqu’il ne prévoit pas un taux d’activité fixe ou minimum.

Dans ce contexte, il ne peut s’agir que d’un contrat de travail sur appel ou d’un contrat de travail occasionnel (aussi appelé travail sur appel improprement dit).

Dans le cadre du travail sur appel, l’employé n’a pas le choix de refuser de fournir sa prestation de travail. L’employeur fait de temps en temps appel aux services du travailleur, qui s’engage à se tenir durablement à la disposition de l’employeur. Cela a pour conséquence que :

  • la mise à disposition au bénéfice de l’employeur doit être rémunérée.

  • l’employeur ne peut mettre un terme à la relation contractuelle que dans le respect des délais de congé contractuels ou prévus par la loi (à savoir 1 mois durant la première année de service, 2 mois de la deuxième à la neuvième année de service, puis 3 mois ultérieurement).

  • L’employeur ne peut faire supporter le risque d’entreprise au travailleur : si l’employeur s’abstient d’offrir au public la prestation de service du travailleur, l’employeur devra néanmoins lui payer son salaire. Ce dernier sera calculé sur la moyenne des rémunérations perçues pendant une période déterminée équitablement, généralement 12 mois.

A la différence du travail sur appel, le contrat de travail occasionnel laisse le travailleur libre, à chaque demande de son employeur, d’accepter ou de refuser l’engagement offert. Chaque convocation acceptée par le travailleur crée un nouveau contrat de travail de durée déterminée qui s’éteint automatiquement à l’expiration de la mission. Le contrat de travail occasionnel a pour conséquences que l’employé n’aura pas droit à la poursuite du versement de son salaire si l’employeur ne fait plus appel à lui. Cependant, si l’employeur recourt à une succession de contrats de travail occasionnels dans le but est de contourner les dispositions protectrices de l’employé, en particulier les délais de résiliations du contrat de travail, l’employé pourra demander à bénéficier d’un délai de résiliation et à ce que son salaire continue de lui être versé durant ce délai.

Les employés d’espaces culturels (musées, institutions, etc.) et dont les horaires fluctuent à la demande de l’employeur ou selon la fréquentation du lieu sont soumis aux mêmes règles.

Au vu de ce qui précède, il est impératif de déterminer si l’employé est au bénéfice d’un contrat de travail (écrit ou non) et, cas échéant, si celui-ci doit être qualifié de contrat de travail sur appel ou de contrat de travail occasionnel. Quant à l’employeur, on ne saurait trop lui recommander de solliciter la réduction de l’horaire de travail (RHT), même si une telle demande aboutira vraisemblablement à certaines difficultés supplémentaires afin de démontrer la perte de travail subie.

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  • Les réponses publiées ne constituent pas un conseil juridique personnalisé.