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Pourquoi la loi climat ne parle pas d'agriculture (alors qu'elle devrait)

Des alpagistes déplacent des vaches vers les alpages d'Urnerboden, le 18 août 2020. | Keystone / Urs Flueeler

L'agriculture est la grande oubliée de la loi climat, qui doit être votée le 18 juin 2023. Son empreinte carbone est pourtant loin d'être négligeable. Pourquoi un tel choix? Derrière les difficultés techniques, se profile la volonté politique de ne pas braquer les agriculteurs.

Pour atteindre la neutralité carbone au milieu du siècle, la Suisse devra réduire ses émissions gaz à effet de serre (GES) dans l’industrie (-50%), les transports (-57%) et le bâtiment (-82%) d’ici à 2040. Du moins, si la loi fédérale pour la protection du climat et de l’innovation est acceptée par la population le 18 juin 2023.

Et l’agriculture dans tout ça? Le secteur, pourtant contributeur non négligeable à l’empreinte carbone nationale, se démarque par son absence dans les objectifs introduits par le projet de loi climat. Loin d’être un oubli, ce choix résulte autant d’une certaine complexité du secteur que d’une stratégie politique.

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Le poids de l’agriculture. Le contenu de nos assiettes pèse sensiblement dans la balance climatique: l’agriculture émet 14% des gaz à effet de serre (GES) suisses.

  • L’agriculture représente la 4e source de carbone en Suisse, derrière les transports (31%), l’industrie (24%) et le logement (18%).

  • Certes, les émissions au sein des exploitations ont diminué de 15% depuis les trois dernières décennies.

  • Mais la décrue amorcée pour le méthane (CH4) et le protoxyde d'azote (N2O), puissants GES, tend à stagner depuis le début des années 2000.

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Évolution des émissions de GES du secteur de l’agriculture, par gaz (CO2, CH4 et N2O). Indicateurs de l’évolution des émissions de gaz à effet de serre en Suisse 1990–2021, avril 2023. | OFEV

De plus, l’empreinte carbone de l’agriculture est sous-évaluée, notamment parce que seules les émissions générées en Suisse sont décomptées.

  • Un quart de l’azote utilisé dans les champs suisses provient d’engrais minéraux importés, une industrie parmi les plus polluantes au monde;

  • Les aliments concentrés fournis au bétail sont, en majeure partie, d’origine étrangère;

  • Les émissions liées à la transformation des denrées alimentaires sont comptabilisées dans le secteur de l’industrie.

  • En 2018, les denrées alimentaires consommées en Suisse représentaient pas moins de 15,6 millions de tonnes d’équivalent CO2 — le double de l’empreinte agricole seule. Deux tiers de cette empreinte seraient liés aux importations.

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Trop complexe. Pourquoi donc ne pas avoir inscrit des réductions indicatives, à l’instar d’autres secteurs? «Nous n’avons pas, au vu de la complexité du sujet, fixé des objectifs contraignants», répond Jacques Bourgeois, président de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie (Ceate-N) du Conseil national. C’est cette commission qui a eu la charge de rédiger le projet de loi fédérale, contre-projet indirect à l’initiative pour les glaciers.

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