Les poivrons de la colère: Syngenta gagne le droit de breveter la nature
Un brevet controversé de la firme bâloise Syngenta portant sur un poivron résistant aux insectes était sous la loupe de l’Office européen des brevets ce jeudi 16 février. Après dix ans de bras de fer, le géant de l’agrochimie en est sorti gagnant. Un échec cuisant pour des agriculteurs, sélectionneurs et ONG qui qualifient l’affaire de «biopiraterie».
Peut-on privatiser le vivant? Depuis dix ans, un brevet controversé sur un poivron est au cœur de toutes les tensions. Il doit permettre au groupe agrochimique bâlois Syngenta de détenir des droits exclusifs sur une résistance aux insectes pourtant naturelle.
Ce jeudi 16 février, cette affaire historique s’est finalement soldée par un échec cuisant pour les opposants à Syngenta, qui espéraient que la révocation du brevet lancerait un signal fort «contre l’appropriation de la nature par des multinationales».
Un poivron au cœur de toutes les tensions. Tout commence en mai 2013, lorsque l’Office européen des brevets (OEB) délivre un brevet à la firme bâloise Syngenta, lui garantissant les droits exclusifs sur tous les poivrons présentant une résistance aux mouches blanches. La patente s’applique à toute l’Europe – dont la Suisse.
Le problème, c’est que cette résistance a été obtenue en croisant un poivron sauvage de Jamaïque, qui détient une résistance naturelle à ces insectes, avec un poivron commercial.
Pour l’opposition, il ne s’agit donc pas d’une «invention brevetable», mais d’une «privatisation illégitime d'un poivron obtenu de manière conventionnelle».
Elle dénonce un acte de «biopiraterie» qui empêche les agriculteurs européens d’utiliser librement les propriétés de ces plantes pour leur culture, en les rendant dépendant de licences souvent onéreuses.
Une large coalition composée d’organisations d’agriculteurs, de sélectionneurs et des ONG de 27 pays — dont Public Eye et SWISSAID en Suisse — avaient ainsi déposé un recours en 2014. La procédure a patiné pendant près de dix ans.
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