Selon le GIEC, les pertes de récoltes liées aux sécheresses et aux canicules auraient triplé ces 50 dernières années en Europe. Aujourd’hui déjà, une vingtaine de pays souffrent d’un «risque extrême» de «stress de chaleur». D’ici à 2045, 64 pays seront concernés, d’après une étude publiée le 8 septembre par Verisk Maplecroft, un cabinet d’analyse de risques britannique. Soit l’équivalent de 71% de la production alimentaire mondiale.
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Adaptation et résilience, les maîtres mots. L’agriculture doit donc s’adapter et remettre au goût du jour certaines techniques et connaissances oubliées ou mises de côté.
Certaines plantes traditionnelles particulièrement résistantes à la sécheresse sont déjà en train de faire leur retour dans nos champs. En voici trois:
le sorgho: ce n’est pas une totale inconnue, c’est la cinquième céréale la plus cultivée dans le monde. Son avantage? Une consommation d’eau environ 30 % moins importante que le maïs. Ses racines partent chercher l'humidité très loin dans le sol. Cette céréale est aussi très résistante aux maladies et ravageurs, donc nécessite moins d’engrais ou de pesticides.
l’amarante : c’est une pseudocéréale, comme le sarrasin ou le quinoa. En Afrique et en Asie, ses feuilles ont longtemps été consommées comme un légume, alors qu’en Amérique les Aztèques et les Mayas consommaient ses graines. On la trouve de plus en plus facilement dans nos supermarchés et l’Ukraine est devenue le plus grand producteur européen.
Le fonio, qui ressemble au millet. C’est une des graines cultivées les plus anciennes du continent africain. Elle est beaucoup plus facile à cultiver que le blé et le riz, et bien mieux acclimatée au climat chaud et sec. Autre point positif: comme le sorgho, elle n’a pas besoin d'intrants chimiques. En 2018, une compagnie italienne a contribué à introduire le fonio dans l’Union européenne.
La diversité génétique, une arme de poids. Aujourd’hui, trop souvent, sur des centaines d’hectares, on cultive la même chose. C’est ce phénomène de monoculture qui a provoqué la grande famine irlandaise au 19ᵉ siècle. Toutes les pommes de terre cultivées étaient de la même variété. Quand le mildiou est arrivé, il a détruit toutes les récoltes du tubercule du pays. C’est la dépendance à une seule sorte de pomme de terre qui a causé cette tragédie, alors qu’il existe plus de 4800 espèces de patates.
Le même phénomène est arrivé aux bananes de variété «Gros Michel» qui constituaient l’essentiel des plantations au début des années 1900. La variété a été quasiment éradiquée par un champignon. Elle a ensuite été remplacée par la «Cavendish» qui est résistante à ce champignon et est la banane que l’on trouve dans la majorité de nos supermarchés. Aujourd’hui, le problème est en train de réapparaître. Les cultures de «Cavendish» sont menacées par un nouveau champignon favorisé par le changement climatique. D’autres cultures, comme le maïs, le blé ou le café, pourraient aussi être les prochaines victimes de ces monocultures non adaptées aux modifications du climat.
La hausse des températures, les sécheresses et les catastrophes climatiques fragilisent nos récoltes. L’agriculture a plus que jamais besoin de diversité génétique afin d’améliorer sa résilience face aux changements à venir. La diversité permet d’assurer les récoltes. Certaines espèces plus résistantes à la sécheresse survivront à une vague de chaleur, alors que d’autres résistent mieux à certaines maladies ou inondations.
Outre les variétés plantées, c’est tout un système agricole qui doit être repensé. Pendant la COP27 la question de la résilience de l’agriculture face au changement climatique a, à nouveau, été discutée, mais les pays peinent à se mettre d’accord pour résoudre les enjeux de lutte et d’adaptation au changement climatique tout en parvenant à la sécurité alimentaire.
Les étudiants de l’Ecole cantonale d’art de Lausanne (ECAL) ont mis ce sujet en image dans une courte vidéo en réinterprétant librement les recherches des journalistes de Heidi.news. Réalisation: Camille Surdez